Le défi des déchets nucléaires : une étude comparée pour plus de transparence. 10 experts internationaux publient, avec 8 partenaires dont la Fondation Heinrich Böll, la version française du Rapport Mondial sur les Déchets Nucléaires.
Le choix du nucléaire est aussi le choix de la production massive de déchets dont la dangerosité subsistera pendant plusieurs centaines de milliers d’années. « L’accumulation de déchets radioactifs reste un problème non résolu dans la plupart des pays nucléaires », souligne Yves Marignac, « avec à chaque fois des enjeux techniques et financiers énormes ».
Sur l’ensemble de leur durée de vie, les réacteurs nucléaires européens pourraient produire un total de 6,6 millions de m3 de différents types de déchets nucléaires soit l’équivalent d’un terrain de foot occupé sur 919 mètres de hauteur (3 fois la Tour Eiffel). Quatre pays sont responsables de 75 % de ces déchets : la France avec 30 %, la Grande-Bretagne avec 20 %, l’Ukraine avec 18 % et l’Allemagne avec 8 %. Le traitement du combustible usé, considéré comme un déchet de haute activité dans certains pays, constitue l’essentiel de la radioactivité produite : selon le rapport, plus de 60 000 tonnes de barres de combustible usé sont entreposés (de manière provisoire) à travers l’Europe (hors Russie et Slovaquie).
Les coûts du traitement de ces déchets de haute activité sont conséquents pour les Etats concernés, requérant dessolutions techniques difficiles à mettre en œuvre. Manon Besnard de l’institut négaWatt souligne : « L’option envisagée pour gérer les déchets les plus radioactifs reste le stockage géologique, mais aucun pays n’a à ce jour réussi à mettre en œuvre un centre de stockage de ce type ». En France, le projet d’enfouissement en formation géologique profonde (CIGEO), dont la construction doit débuter en 2023 ou 2024 se heurte à d’importants obstacles techniques et politiques et en Allemagne, un processus en trois phases s’appuyant sur la participation publique doit déboucher sur la sélection d’un site d’ici à 2031. Arne Jungjohann, coordinateur du rapport, alerte sur la « sous-estimation significative par les gouvernements nationaux et les opérateurs des coûts du déclassement, du stockage et de l’élimination des déchets nucléaires. Pas un seul pays en Europe n’a jusqu’à présent pris les dispositions suffisantes pour les financer. Il y a un risque que les coûts réels, massifs, soient finalement supportés par les contribuables ».
Le rapport met en lumière les problèmes de gestion de la France. Pour Manon Besnard, « une part importante des matières valorisables pourraient être requalifiée en déchets, en l’absence de perspectives réalistes de valorisation. C’est le cas de larges quantités d’uranium appauvri, mais également de certains combustibles usés, comme le MOX, pour lesquels aucune réutilisation n’est prévue à court ou moyen terme ». Elle s’inquiète de la situation actuelle : « la saturation prévisible des entreposages de combustibles usés et le retard pris par EDF dans le projet de construction de nouvelles capacités menace à terme la poursuite même du fonctionnement des réacteurs ».
Rebecca Harms, ancienne députée et initiatrice du projet, conclut : « Il est important de ne pas seulement transmettre à la prochaine génération le problème des déchets nucléaires, mais aussi et surtout les connaissances acquises dans le cadre du débat autour de leur gestion ».
Pour consulter le rapport, cliquez sur ce lien ou bien sur l’image ci dessous.